La réponse du Premier ministre (PM) Navin Ramgoolam aujourd’hui 7 septembre à la PMQT de Kushal Lobine concernant l’arrestation de notre journaliste Narain Jasodanand est choquante. Il a communiqué au Parlement les explications que la police, qui est pourtant pointée du doigt dans cette affaire, a bien voulu faire croire pour justifier cet acte illégal et qui parait de plus en plus commandité.
Ainsi, le PM affirme que la descente de la police chez Narain Jasodanand fait suite à une première déposition le 29 août de Kreeti Devi Jugasing-Harrah, l’Officer-in-Charge de la MIC. Or, chez Scoop.mu, nous n’en sommes pas au courant. D’ailleurs, lorsque les policiers ont débarqué chez notre journaliste, le sergent l’a informé que la police est venue chez lui à la suite de la déposition de Tevin Sithanen pour un article écrit la veille, soit le 11 septembre. De plus, le sergent lui a montré un mandat de perquisition faisant mention d’une déposition de Tevin Sithanen, pas de Harrah.
On se souvient aussi que Gavin Glover avait parlé de la plainte de Tevin Sithanen faite la veille de l’arrestation. A aucun moment l’Attorney General n’avait fait référence à un dépôt de plainte venant de Harrah.
L’élément Sotravic
On ne sait pas pourquoi Harrah aurait fait une déposition le 29 août. Si elle l’avait faite, ce serait manifestement après nos articles du 25 et du 28 août concernant la MIC et dans lesquels nous parlions de la tentative de Rama Sithanen de vendre un terrain de la MIC à Sotravic. En fait, les articles accusaient Rama Sithanen, pas la MIC. On comprend mal la démarche de Harrah sauf si elle l’a fait comme elle l’avait fait dans l’affaire Menlo Park, en s’empressant d’aller déposer plainte pour plaire à celui qui l’a nommée à la tête de la MIC.
A noter que lorsque nous avons écrit ces articles précités, nous avions contacté Rama Sithanen. Il nous avait répondu en disant que le document que nous avions était un faux. Quant à Mme Harrah, elle ne répond jamais à nos sollicitations.
Il est évident que la police et Ramgoolam ne veulent pas que la population sache que la descente de la police chez Narain faisait suite à une plainte du fils du gouverneur, qui n’a rien à faire avec la MIC ou la BOM.
Comment mettre le CP hors de cause
Les autres mensonges de la police qu’on veut nous faire gober : Narain avait été contacté en vain à la suite de quoi une réunion au sommet avait eu lieu au CCID « comprising senior most officers », souligne Ramgoolam, et à l’issue de laquelle une demande de mandat de perquisition aurait été décidée. Tiens, tiens ! Des seniors most officers qui se rencontrent pour cette affaire et qui n’informent pas le Commissaire de Police (CP) ? Ont-ils été mutés ?
Du reste, lorsque Narain voulait savoir le 11 septembre pourquoi la police ne l’a pas contacté au téléphone au lieu de débarquer chez lui, le sergent lui a répondu que la police n’avait pas son numéro de téléphone ! Tout en ajoutant que Tevin SIthanen, que Narain avait appelé, ne leur avait pas fourni le numéro non plus. En tout cas, les policiers avaient son adresse exacte !
Toujours selon Ramgoolam, c’est Narain qui aurait jeté son ou ses téléphones portables par terre. Pourquoi ? On aimerait bien le savoir. Ramgoolam fera aussi comprendre que c’est aux Casernes que Narain a admis être l’auteur des articles en question. Or, Narain l’avait déjà admis chez lui et d’ailleurs il avait signé ces articles. Pourquoi alors saisir ses téléphones et son laptop ? Explication de Narain : « de toute évidence pour connaitre mes sources. »
Joe Lesjongard demandera au PM pourquoi, si le CP n’était pas au courant de cette interpellation musclée, avait-il déclaré à la presse « ine fer sa ki ti bisin fer.» Le PM, pris au dépourvu, répondra : « le fait que les téléphones furent jetés par terre, il a fallu les saisir. C’est ce que le CP voulait dire ! »
Police exemplaire
Si l’on croit le PM, Narain a suivi les policiers volontairement, il n’a pas été menotté, que les gentils policiers lui ont respectueusement informé de ses droits constitutionnels et même permis d’appeler son avocat. L’avocat, Roshi Bhadain, sera en fait contacté bien plus tard, aux Casernes Centrales, à travers le téléphone de la police !
Lors de la PNQ axée sur la BOM, Joe Lesjongard avait fait le parallèle entre la lenteur de la police lorsque c’est Tevin Sithanen qui avait fait l’objet d’une plainte venant de Menlo Park et la vitesse de l’éclair à laquelle cette même police a agi après la plainte de Tevin SIthanen contre Narain Jasodanand. Ramgoolam n’avait pas d’explication plausible.
Navin Ramgoolam a annoncé une enquête par le même CP dans cette affaire et a souligné qu’en attendant, six policiers ont été mutés pour ne pas gêner l’enquête. On se demande pourquoi ces transferts et cette enquête puisque selon Navinchandra Ramgoolam lui-même, tout s’est bien passé, la police a bien agi et c’est Narain qui a commis un délit en offensant Tevin Sithanen.
Et d’ailleurs, pourquoi une autre enquête quand il y en a eu déjà une à la demande Paul Bérenger ? Et où est le rapport de cette première enquête ?
Après toutes ces incohérences, on est en droit de s’interroger : qui Ramgoolam protège-t-il ? Le CP ? Un autre haut-gradé des Casernes ? Ou alors quelqu’un à la BOM qui aura appelé les Casernes pour demander aux gabelous de donner une correction à ce journaliste qui se permet de croire en la liberté de la presse ?
