La Lettre qui Révèle l’Ampleur de la Corruption Institutionnelle

La lettre de BOA Group datée du 29 avril 2025 ne devrait surprendre personne. Elle constitue la pièce manquante d’un puzzle sordide qui révèle comment la Banque de Maurice s’est transformée en annexe des intérêts privés de la famille Sithanen.

Cette missive, adressée au First Deputy Governor Rajeev Hasnah, expose avec une clarté aveuglante la capture réglementaire orchestrée par Tevin Sithanen, fils du Gouverneur. Mais ce qui frappe le plus, c’est l’impudence avec laquelle BOA étale sa stratégie de contournement des procédures officielles.

 

L’Anatomie d’un Détournement Institutionnel

Analysons les faits : un demandeur de licence bancaire ne contacte pas directement les dirigeants d’une banque centrale pour “recevoir votre avis sur la structure à privilégier.” Cette phrase, enfouie dans l’avant-dernier paragraphe, révèle une méconnaissance crasse du rôle d’un régulateur – ou pire, une tentative délibérée de transformer le First Deputy Governor en consultant privé.

Car enfin, depuis quand les banques centrales conseillent-elles les demandeurs sur la meilleure façon de structurer leurs dossiers ? Cette demande constitue une violation frontale des principes de séparation entre régulateur et régulé. Elle transforme de facto Rajeev Hasnah en complice d’une stratégie d’optimisation réglementaire.

 

Le Fils du Roi et ses Petites Affaires

Mais le plus révoltant reste l’origine de cette démarche. Que Tevin Sithanen, qui n’a aucun mandat officiel, puisse orchestrer une rencontre entre le CEO de BOA et les dirigeants de la Banque de Maurice révèle l’étendue de la gangrène familiale.

Les messages WhatsApp documentent méthodiquement ses interventions : pression pour licencier du personnel, lobbying pour des nominations douteuses, influence sur les appels d’offres. Tevin Sithanen opère comme un véritable courtier en influence, utilisant le bureau de papa comme salle de marché pour ses petites combines.

 

La Complicité du Silence

Mais ne nous y trompons pas : cette lettre de BOA n’est pas le fruit du hasard. Elle révèle que le système a fonctionné. Rajeev Hasnah a bel et bien accepté la rencontre, légitimant ainsi le rôle d’intermédiaire de Tevin et ouvrant la porte à tous les abus.

Car lorsqu’un régulateur accepte de recevoir un demandeur de licence à la demande du fils du Gouverneur, il ne se contente pas de violer les procédures. Il envoie un signal clair : à la Banque de Maurice, les relations familiales prévalent sur l’intérêt général.

 

L’Indépendance Confisquée

Cette affaire illustre parfaitement comment s’effrite l’indépendance d’une institution cruciale. Chaque compromission, chaque “petit service” rendu, chaque procédure contournée érode un peu plus la crédibilité de l’institution.

Les investisseurs internationaux, les agences de notation, les institutions financières multilatérales observent. Ils voient un pays où la banque centrale fonctionne comme une entreprise familiale, où les conflits d’intérêts sont la norme, où l’éthique institutionnelle a été sacrifiée sur l’autel des ambitions personnelles.

 

Le Réveil Nécessaire

Il est temps de nommer les choses : ce qui se passe à la Banque de Maurice n’est ni normal, ni acceptable, ni compatible avec les standards internationaux de gouvernance bancaire.

Gérard Sanspeur avait raison de refuser cette mascarade. Son refus d’accepter cette rencontre inappropriée était le seul comportement éthiquement défendable dans cette situation. Sa mise à l’écart ultérieure prouve que l’intégrité est devenue un handicap professionnel à la Banque de Maurice.

Cette lettre de BOA restera comme le témoignage accablant d’une époque où l’une des institutions les plus importantes du pays a été détournée de sa mission au profit d’intérêts particuliers. L’histoire jugera sévèrement ceux qui ont permis cette dérive.

Et elle commencera peut-être par se demander combien d’autres “lettres de BOA” dorment dans les tiroirs de nos institutions publiques.

 

Thomas Crook

 

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