Face aux multiples interrogations après les récentes révélations à la Banque de Maurice, la seule issue possible pour Rama Sithanen est une démission immédiate.
Le temps n’est plus à peser les mots. La population s’est déjà faite une opinion après la série d’articles, de fuites, de témoignages vocaux et par voie d’affidavit et surtout après que le Premier ministre a déclaré samedi dernier que la situation est devenue intenable à la banque centrale : Rama Sithanen n’a plus le droit de demeurer comme gouverneur une seule minute de plus. Cette opinion, bien qu’imparfaite, est plus avancée que ne le croient ceux qui voudraient toujours la balayer d’un revers de main. Souvenons-nous des 60-0…
Or, quand Rama Sithanen annonce que sa date de départ a été fixée au 30 septembre, il installe un spectacle indécent, sans précédent dans notre histoire récente. Jamais aucun homme public n’a décidé lui-même de sa de sortie dans un tel contexte de controverse.
Ce n’est pas une démonstration de contrôle de la situation de la part de Sithanen, c’est un aveu : il sait que ses jours sont comptés mais il cherche à sauver son image, son honneur — sous conditions. On se rappelle de sa question à la journaliste de Radio Plus Ashna Nuckcheddy : « Oune deza truv dimoune mette Sithanen dehors ou ? »
Pourquoi une “démission différée” est plus qu’insuffisante ?
1. Manque de bonne gouvernance
Le reproche central pointé contre Sithanen est qu’il n’a pas su préserver la séparation entre les intérêts publics, les influences politiques ou familiales, et les procédures administratives. Des rapports de presse font état d’interventions non sollicitées de proches ou d’acteurs extérieurs dans la gestion d’un projet de transformation numérique (IT), d’achats publics passés sous silence ou sous contrôle indirect, d’opacité. C’est ce manque de clarté, cette absence de transparence, qui creuse le fossé entre les institutions et le citoyen.
2. Risque sérieux de manipulation documentaire
Quand le public découvre que des courriels internes, des échanges WhatsApp et autres “discussion papers” ont été utilisés pour influencer des décisions, une réponse immédiate est nécessaire. Un délai jusqu’à fin septembre permettrait — et peut-être permet déjà —d’arranger les dossiers, d’alimenter les versions officielles, de préparer des contre-narratifs. L’urgence réclame que toute documentation soit mise sous scellé avant que ne soit ouverte une enquête indépendante.
3. L’offense au citoyen
Au-delà des aspects techniques ou légaux, le citoyen attend plus que des mots : il attend du respect. Un chef d’institution publique, placé à la tête de la Banque de Maurice, doit porter l’honneur public, et non se permettre un “dernier baroud d’honneur” bien calculé. Cette façon de fixer soi-même la date de sortie — dans un climat de controverse — est vécue comme un mépris : on est plus dans le geste cérémonial que dans l’acte de responsabilité.
L’avocat Me Dev Ramano vient de le dire sans détour : « Rama Sithanen aurait dû partir avec honneur ». Il va jusqu’à affirmer qu’une démission différée est non seulement indécente, mais contraire à ce que réclame l’éthique publique, surtout lorsque le crédit moral s’effrite.
Ce que doit faire la République
• Une démission immédiate de son gouverneur
• Une enquête indépendante, transparente, par des experts extérieurs, accessibles au public, doit être ouverte sur tous les aspects reprochés : influences observées, documents contre-vérités ou versions divergentes.
• Un mécanisme de responsabilité institutionnelle doit être rappelé : dans une démocratie, le pouvoir ne peut se retrancher dans la retenue quand la confiance publique est sérieusement entamée.
Le 30 septembre ne peut pas être un rideau de fin de scène. Il doit devenir le rideau tiré sur une page d’erreurs, une leçon de démocratie. Le peuple ne demande pas la vengeance, mais la vérité sur ce qui s’est réellement passé à la BOM. L’honneur se mesure à la rapidité de l’acte : quand la confiance est rompue, chaque jour de sursis devient une faute. Rien ne justifie d’attendre.
Thomas Crook
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