L’accord de septembre dans lequel l’Inde met à notre disposition $ 680 m contient des clauses inquiétantes concernant le Marine Protected Area autour des Chagos

D’un côté, le bureau du Premier ministre (PMO) qui se réjouit de l’accord signé le 11 septembre entre Maurice et l’Inde pour une aide de $ 680 m couvrant, entre autres, l’assistance de l’Inde pour le développement et la surveillance du Chagos Marine Protected Area (CMPA), pour des études hydrographiques et l’établissement de carte de navigation.

De l’autre, le Haut-Commissariat indien à Maurice qui se réjouit lui-aussi de cet accord dans un bref communiqué du 5 septembre. Tout en évitant de citer les Chagos et les études hydrographiques.

Les détails, on les a eus de plusieurs médias indiens qui reprennent tous une même information provenant sans doute du gouvernement indien : « India and Mauritius have signed a historic agreement to establish a satellite tracking and communication station near Diego Garcia, located in the Chagos archipelago. This pact enhances India’s reach in the Indian Ocean Region (IOR) at a time of rising Chinese maritime presence […] The development highlights India’s ambition to become a leading maritime power in the Indo-Pacific… »

Ni Navin Ramgoolam dans sa conférence de presse du 20 septembre ni le PMO ni le GIS n’a parlé de ce pacte indo-mauricien… Mais qui financera la surveillance par l’Inde de sa rivale, la Chine, dans le CMPA ? L’Inde ou Maurice ?

Surveillance gratuite ?

D’après la « Draft Joint Announcement », donc non officielle, circulée par le PMO, le grant de $ 215 m sera consacré au nouvel hôpital SSR, au centre AYUSH, à l’hôpital et école vétérinaires et à l’achat d’hélicoptères dont on ignore le nombre exact et leur utilisation. Serviront-ils à la surveillance du CMPA ? Si oui, seront-ils plus utiles à l’Inde ou à Maurice ?

Les $ 440 m de prêt serviront, eux, à l’achèvement de la construction la nouvelle tour de contrôle de Plaisance (dont les travaux n’ont jamais été terminés), la construction de la nouvelle autoroute M 4, qui coûtera Rs 10,2 milliards, de la Ring Road phase 2 et à l’acquisition d’équipements pour le port. Ces projets seront probablement exécutés par des entreprises et travailleurs indiens et les équipements viendraient de l’Inde…

Donc d’après ces dotations, il semble que la surveillance du CMPA et les études hydrographiques seront effectuées à titre gracieux par l’Inde. Mais cela reste à confirmer puisque la Draft Joint Announcement, nous le répétons, n’est pas officielle. Et n’est même pas signée.

Mais pourquoi les Indiens le feraient-ils gratuitement ? Même s’ils le font, Maurice n’est-elle pas en train de remettre un peu de sa souveraineté ‘retrouvée’ sur les Chagos à une autre puissance ?

‘Situational awareness’

Il faut savoir que le CMPA, établi par les Anglais le 1 avril 2010, couvre une superficie de 640 000 km carrés, égale à plus d’un quart de notre zone économique exclusif ! Selon un message entre les Américains et les Britanniques de 2009, fuité en décembre 2010 par WikiLeaks, ce CMPA avait été établi pour priver les Chagossiens de leur source principale d’approvisionnement alimentaire, la pêche, et ainsi rendre tout retour de ces derniers aux Chagos quasi-impossible. Le CMPA, disait le message, allait en fait permettre aux Britanniques et Américains d’être en ‘situational awareness’ c.-à-d. à même de détecter tout mouvement suspect près de la base de Diego Garcia de la part de puissances ‘ennemies.’

L’échange fuité laisse comprendre qu’il n’y aurait pas de contrainte pour la base militaire à respecter l’environnement du CMPA. Bien plus, les militaires sont autorisés, eux, à y pêcher. Et ils ne s’en privent pas puisqu’ils ont pris 28 tonnes de poisson en 2010 !

Le gouvernement Mauricien avait contesté ce CMPA avec succès auprès de la Cour permanente d’arbitrage qui a déclaré le 18 mars 2015 que le CMPA est illégal, que Maurice a le droit d’y pratiquer la pêche et même d’y préserver les minéraux et les hydrocarbures.

Une amitié envahissante

Cependant, les Anglais ont fait fi de ce jugement et les gouvernements successifs mauriciens ont fait de même. Depuis 2015 les deux parties seraient en négociation. Après l’avis consultatif de la Cour Internationale de justice en faveur de Maurice le 25 février 2019, le CMPA a subsisté. Et dans l’accord de mai 2025 entre notre pays et le Royaume-Uni, la seule mention qui en est faite est que : « The United Kingdom agrees to provide support and assistance to Mauritius in the establishment and management of its Marine Protected Area in the Chagos Archipelago, in accordance with terms to be agreed between the Parties by a separate written instrument. » On ne sait s’il y a bien eu de « separate written instrument. » On ne sait non plus si ce ‘soutien’ a été demandé par Maurice et si non, pourquoi l’avons-nous accepté.

Au final donc, les Anglais conservent – on peut le dire- le contrôle de ces 640 000 km2 du parc marin et pour faire semblant qu’ils ne sont pas les seuls, ils ont embarqué un de leurs alliés contre la Chine, les Indiens, dans cette entreprise de surveillance du CMPA. On comprend maintenant pourquoi l’Inde s’activait tant pour arriver à cet accord de mai 2025 : après Agalega, au tour du CMPA des Chagos de tomber dans leur escarcelle ! Cela non seulement pour surveiller la Chine mais probablement aussi pour y exploiter, avec les Américains et Britanniques peut-être, les ressources halieutiques, minières et pétrolières ?                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              

 

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